dimanche 4 novembre 2018

"My absolute darling" de Gabriel Tallent


Nous sommes en Californie, au bord de la mer, en lisière de forêt. Julia, surnommée Turtle, a 14 ans, elle vit seule avec son père Martin. Son grand-père paternel habite près de chez eux.
Turtle va à l'école, tous les matins elle prend le bus pour s'y rendre. Elle n'a pas d'amis et rencontre apparemment de grandes difficultés dans son apprentissage.
Une de ses enseignante, Anna, tente de l'aider, mais Turtle est sauvage et solitaire et n'en fait qu'à sa tête.
Dans cette maison où elle vit avec son père, plus rien n'est entretenu, la nature a repris ses droits, mais cela n'a pas l'air de gêner ses occupants.
Il y a des armes, des cibles partout dans la maison et dans la cave il y a de quoi s'auto-suffire pendant plusieurs années. Turtle ne connait peut-être pas correctement son vocabulaire mais elle sait manipuler toutes sortes d'armes à feu, les nettoyer, les démonter et remonter. Elle en connait aussi un rayon sur la nature qui l'entoure, elle n'a peur de rien.
Elle aime son papa et aussi son papy, mais elle n'a visiblement pas encore conscience que toutes les relations qu'elle connait/vit sont tordues. La relation avec son père est très ambiguë. Il lui répète sans cesse qu'il l'aime et qu'il a besoin d'elle pour se lever tous les matins, mais il lui fait vivre un enfer en étant manipulateur, violent. On perçoit que c'est un homme d'une grande intelligence tout en étant extrêmement torturé.
Mais Turtle grandit et à 14 ans elle entre pleinement dans l'adolescence, elle va aussi faire une rencontre qui va chambouler sa vision du monde et de sa vie et de fait chambouler la vie de son père...

C'est un livre absolument époustouflant dans la manière dont le récit est conduit.
L'auteur nous prend dans ses filets dès le départ, il installe la situation, et petit à petit nous dévoile ses personnages, et plus on avance plus on est estomaqué. Il pose le décor et puis doucement, tranquillement il fait évoluer l'histoire et met ses personnages à nu.
La description psychologique des protagonistes ainsi que leur progression est magistralement menée.
Je me suis attachée à cette jeune fille tout en étant bouleversée par sa manière de vivre son histoire, de réagir. J'ai haï le père mais j'ai compris comment elle n'arrivait pas à se détacher de son influence, comment elle a continué à l'aimer malgré tout et petit à petit on la voit ouvrir les yeux.

C'est dur, c'est violent, c'est extrême et puissant.
La fin du livre se lit d'une traite, on est happé et on ne peut plus s'arrêter de tourner les pages tout en ayant les mains qui tremblent, le coeur qui bat la chamade, le souffle coupé.

Quelques notions sont clairement bien exposées notamment sur les armes à feux, sur la nature et le monde dans lequel on vit et ce que l'on en fait.

On comprend aisément pourquoi il aura fallu 8 ans à Gabriel Tallent pour écrire ce premier roman. Il nous offre un moment de lecture incroyable et intense.
J'ai énormément aimé ce livre mais ne peux malgré tout pas le mettre en coup de coeur, impossible de mettre un joli coeur rouge à côté de ce texte d'une violence physique et psychologique parfois intolérable.

A lire absolument, mais attention tout de même, âme sensible s'abstenir !
"... Si tu n'es pas convaincu que le monde va mal, papa, c'est que tu ne regardes pas autour de toi. Les cerfs, les grizzlys, les loups ont disparu. Les saumons aussi, presque. Les séquoias, c'est terminé. Des pins morts, on en trouve par bosquets entiers sur des kilomètres carrés. Tes abeilles sont mortes. Comment on a pu faire naître Julia dans un monde aussi merdique ? Dans cette dépouille putride de ce qui aurait dû être, dans ces restes à l'agonie, violés ? Comment tu veux élever une enfant en compagnie de tous ces connards égocentriques qui ont détruit et gâché le monde dans lequel elle aurait dû grandir ? ..."
Gallmeister, 454 pages.

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