"Je suis autiste Asperger. Ce n'est pas une maladie, je vous rassure. C'est une différence. Je préfère réaliser des activités seul plutôt qu'avec d'autres personnes. [...] Je vais vous raconter une histoire. Cette histoire est la mienne. J'ai participé au jeu télévisé Question pour un champion et cela a été très important pour moi.
Voilà donc à peu près le résumé de ce livre.
En effet, Olivier Liron nous emmène dans ses coulisses du jeu Question pour un champion, étape par étape il nous livre ce qu'il vit, comment il perçoit les autres candidats et surtout le présentateur Julien Lepers.
Ce n'est pas n'importe quel jeu car il s'agit d'être le super-champion et il y a un homme à abattre, Michel, déjà super-champion lui-même.
Il y a donc les 3 séquences du jeu, "les neuf points gagnants", "le quatre à la suite" et enfin "le face-à-face", on a l'impression d'être à l'intérieur de sa tête et de revivre l'émission face aux questions, aux stress, on vit les interruptions, les retours, les pauses, les problèmes techniques.
Et puis entre deux il y a un peu de son intimité qu'il nous livre par bribes, des souvenirs notamment de son enfance, de son adolescence.
Les souvenirs sont courts mais d'une force rare car "sa différence" a fait toute la différence, on prend un petit coup de poing dans le ventre car ce qu'il a vécu est d'une violence inattendue.
"La joie, le vert paradis, la douceur de l'enfance, ça, désolé, on repassera, je n'ai pas connu. Cela restera à jamais pour moi incompréhensible, cette violence. Ça marque au fer rouge. S'il n'y avait que les brimades, les blagues sur Forrest Gump et les insultes. On pourrait essayer d'oublier. Mais la façon dont les autres vous font comprendre votre différence, ça s'inscrit aussi dans le corps. J'ai dans mes tripes la mémoire de la différence qu'on m'a apprise, qu'on a tatouée dans ma chair."On se rend compte qu'il y a une vraie incompréhension du système scolaire, des enseignants et des personnels des collèges/lycées, on ne le comprend pas - ou on ne l'écoute pas ? Mais il subit de plein fouet la violence et la stupidité des uns et des autres. Et apparemment ses parents ne lui sont pas d'un très grand secours, eux-mêmes enfermés dans leurs problèmes de couple.
"C'est marrant, je parle du corps, mais j'ai l'impression que les mots ont encore plus de pouvoir que les coups, que les mots sont les coups qui ne partent jamais, les plus indélébiles, les plus violents pour le corps, justement. [...] J'ai dû entendre dix mille fois les gens m'appeler gogol. À l'école, et surtout au collège, les enfants différents souffrent le martyre. C'est déjà le pouvoir hideux et haineux de la norme. Aujourd'hui encore, quand j'entends à la radio les « normaux », ceux qui ont le pouvoir de la norme, de dicter la norme, de faire la norme, les politiciens et les financiers, les humoristes pas drôles, les haineux de tous bords, j'ai envie de les déchiqueter avec les dents. Pour leur montrer de quel bois on se chauffe, nous les gogos. Je ne raconte pas ça pour me faire plaindre, mais pour témoigner de l'abandon absolu de tous les enfants différents par l'Éducation nationale."Alors bien sur il se protège, cherche un moyen de "survivre", mais j'avoue que parfois j'ai été un petit peu heurtée par la virulence de ses propos, on sent de la colère, de la fureur.
"Quand on ne peut pas parler, on construit des forteresses. Ma forteresse à moi est faite de solitude et de colère. Ma forteresse à moi est faite de poésie et de silence. Ma forteresse à moi est faite d'un long hurlement. Ma forteresse à moi est imprenable. Et j'en suis le premier prisonnier."Sa description du jeu est plutôt drôle, cynique, même sarcastique. Il n'a aucune pitié pour les autres candidats, il entre en guerre et veut gagner. Il est d'une très grande lucidité.
J'ai beaucoup aimé les parties où il nous dévoile l'analyse de ses raisonnements pour trouver les réponses aux questions.
Un livre intéressant et qui se lit rapidement.
Alma Editeur, 194 pages.
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