mercredi 4 avril 2018

❤️❤️ "Ces rêves qu'on piétine" de Sébastien Spitzer



La fin de la seconde guerre mondiale approche, des colonnes de réfugiés des derniers camps de concentration sinuent dans la campagne, ce sont les derniers témoins à éliminer absolument.
Parmi ces réfugiés un rouleau de cuir fermé par une ficelle circule, dans ce rouleau des lettres. Elles sont le témoignage des camps, de l'abomination, mais aussi le témoignage de la plus grosse imposture du Reich.
Chacun, qui sera en charge du rouleau, rajoutera sa lettre, son mot, son message, jusqu'au dernier, jusqu'à Ava, cette petite fille rescapée, qui ne parle pas (encore) mais qui a tant vu, tant vécu.

Pendant ce temps à Berlin les derniers représentants du Reich se préparent aussi à disparaitre, la chancellerie sera bientôt prise par les russes qui arrivent.
Adolf et Eva se marient et se suicident, la famille Goebbels est présente, ce qu'il en reste. Magda et ses 6 enfants (l'aîné est prisonnier des russes), son aide de camp, le radio, le médecin, et le "rat" son époux fanatique.
Magda attend le "moment", elle n'en peut plus, sait que c'est la fin. Et elle se remémore...
Ses origines de fille bâtarde, une enfance isolée, pauvre, le pensionnat. Son ami-amour aussi, Viktor, le sioniste, son père adoptif... elle aura tout renié pour être "la première", pour être sur le devant de la scène.
Magda a été bouleversé par un livre écrit par un soldat de la première guerre, "À l'Ouest, rien de nouveau" de Remarque, livre qu'elle a mis longtemps a lire, et puis elle est allée voir l'adaptation cinématographique, avec son ami Viktor, et lors de cette représentation elle a aperçu pour la première fois celui qui deviendrait son mari, Joseph Goebbels. Il n'était pas là pour regarder le film mais pour dénoncer le traitre qui avait écrit le livre, le traitre qui critiquait la guerre...
Plus rien ne l'arrêtera, elle rentrera au parti et réussira à devenir ce qu'elle voulait, la première femme du pays, du Reich, une femme de pouvoir, pour cela elle a tout écrasé.

On pourrait se dire qu'il s'agit encore d'un livre sur la seconde guerre mondiale, le nazisme et les camps de concentration ; alors oui bien sur on retrouve l'horreur de toute cette guerre mais la construction de ce roman est assez originale et très intéressante.
Il y a une alternance de chapitres qui nous emmène de Magda Goebbels - dans son bunker et ses souvenirs - aux rescapés des camps qui transportent et transmettent un certain témoignage, et au milieu de ces chapitres il y a les lettres de Richard Friedländer à sa fille.

Un premier roman tout à fait réussi, où l'Histoire se mêle au romanesque dans une fresque terrible. C'est profond, puissant et tellement différent. Découverte d'un personnage important de notre Histoire contemporaine.
"Vous êtes l'incarnation de notre pire ennemi : l'oubli."
"Richard Friedländer a été. Il a lié son destin à celui de votre famille. Je suis Markus Yehuda Katz, fils de Salman et d'Olga Sternell. Et cette chaîne de mots, de moi, de nous, de noms infalsifiables, vous rattrapera, où que vous soyez. Il n'y aura pas d'oubli. Nous sommes le peuple qui doit durer, celui qu'on ne peut pas éteindre..."
Les éditions de l'Observatoire, 305 pages.

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