lundi 27 mars 2017

"Destiny" de Pierrette Fleutiaux



Destiny est une migrante, elle arrive du Nigéria via l'Italie où elle a déjà passé quelques années.
Anne est française, de classe moyenne, bientôt grand-mère.

Elles se rencontrent dans le métro, Destiny est enceinte et en difficulté ; Anne décide de l'aider, parce qu'elle parle anglais, la seule langue que Destiny comprenne, ici, à Paris.

Une relation compliquée va s'installer entre les deux femmes, entre compassion et culpabilité, entre reconnaissance et folie.

Destiny a vécu des choses difficiles dans son pays, mais aussi au cours de son "voyage migratoire" vers l'Europe où lorsqu'elle arrivera, sera déçue par les promesses qu'on lui a faites.
Elle laisse des enfants derrière elle, un mari ....
Anne ne peut pas sauver le monde, mais elle voudrait "sauver", aider, Destiny.

C'est un livre sur les migrants, sur les difficultés qu'ils rencontrent en arrivant, la misère et la pauvreté dans laquelle ils se trouvent, on entr'aperçoit aussi les douleurs d'où ils viennent, les violences.
Mais c'est aussi un livre sur ceux qui les "accueillent", comment agir, réagir, que faire ? La complexité du lien, de la rencontre, de la relation.
Ce n'est pas un livre politique, juste une vision des choses, regarder la vie telle qu'elle est parfois, "au premier degré".

J'ai beaucoup aimé ce livre dont le style, le rythme, sont rapides, efficaces. Pierrette Fleutiaux va droit au but avec des chapitres courts, des phrases courtes, parfois sans verbe. Du coup on avance vite, on suit, on tourne les pages.
"Avoir un destin, c'est jouir d'une existence reconnue, admise. C'est se regarder dans un miroir et pouvoir dire : "je suis moi". C'est ne pas être un grain de poussière foulé aux pieds, une miette balayée au gré des caprices d'autrui. Ne pas être un dommage collatéral des guerres, une chair vivante coincée dans les rouages d'obscurs conflits de gangs ou de non moins obscures raisons d'État. C'est échapper à c e qui était prévu pour vous, c'est faire un crochet, bondir sur une autre voie et aboutir loin, loin, sur une tout autre ligne d'arrivée. C'est marcher sans peur, ne pas guetter des bombes dans le ciel, des explosifs sur les passants. Travailler, faire les courses, conduire ses enfants à l'école. Aller au parc. L'ordinaire. Atteindre à l'ordinaire de la vie est justement un exploit extraordinaire pour Destiny, c'est un exploit extraordinaire pour des millions de personnes. Pour ces millions de personnes, c'est avoir un destin. Ce destin est là, quelque part dans l'avenir. Il faut arriver à le rejoindre. Pour des millions de personnes, cela se fait à pied, à bord de camions surchargés, de bateaux-poubelles, sous la menace de l'assassinat, de la noyade, de l'épuisement, du désespoir. Dans l'humiliation et la perte. Atteindre l'ordinaire de la vie passe par des risques extraordinaires, avec la mort comme compagne tout à fait banale."
"Des gens qui n'avaient jamais navigué auparavant on réussi à garder le bon cap sur la mer, sur l'horizon infini, beaucoup sont morts, mais certains ont réussi. Les migrants sont capables d'exploits qui relèvent du miracle. C'est dans le grand livre des migrants que se trouvent les miracles d'aujourd'hui." 
"Les barques arrivent de plus en plus nombreuses, on les voit à la télévision, chaque jour elle arrivent, chargées de vivants et de morts, personne ne les veut, ces rivages les attirent comme des aimants, mais lorsqu'ils y abordent les aimants s'inversent, les migrants sentent la force qui veut les repousser, vous n'êtes pas aimés ici, partez, disparaissez à nos regards, allez où diable vous voulez, mais qu'on ne vous voie plus, qu'on ne voie plus votre misère, votre fatigue, votre angoisse, vous nous faites peur, voilà ce que crient les rivages où enfin ils arrivent."

Lu via la "bibliothèque orange".

jeudi 23 mars 2017

"2084 la fin du monde" de Boualem Sansal



Nous ne sommes pas en 2084 mais à une date ultérieure, cette date est celle du début, celle au-delà de laquelle on ne sait rien.
Nous sommes en Abistan, nouveau pays, nouveau monde ?, le dieu vénéré est Yölah et son unique prophète et représentant est Abi, immortel...
Le pays/monde est sec, pauvre, lugubre, il n'y a apparemment plus grand chose après de multiples guerres de religion, des guerres parfois atomiques.
Nous suivons Ati, un simple employé de mairie qui vient de passer une année complète dans un sanatorium pour soigner sa tuberculose. Il s'en est miraculeusement sorti et va donc retourner chez lui, où personne ne l'attend. En chemin il va faire des rencontres qui vont attiser sa curiosité, il avait commencé à se poser des questions lors de son séjour au sanatorium, sur une frontière qui existerait, sur un autre monde, un autre pays, sur cette religion qu'il observe. Il va donc retourner dans sa ville et continuer à se poser des questions jusqu'à ce qu'il rencontre Koa avec qui ils vont partir à l'aventure pour essayer d'en découvrir un peu plus sur le "monde" dans lequel ils vivent et surtout sur cette religion un peu mystérieuse...

Nous avons ici une dystopie qui nous met en garde sur une certaine religion...

Alors pour être tout à fait honnête ce genre littéraire n'est pas du tout ma tasse de thé, et en principe je ne me tourne pas vers cette littérature. J'avais d'ailleurs déjà décidé que je ne lirai pas ce livre (Fontaine, ....) , mais c'était sans compter sur notre super librairie française ici à HK qui nous organise très souvent de belles rencontres. Et voilà, Boualem Sansal invité ! J'ai donc acheté et lu le livre...

J'ai énormément aimé écouter Boualem Sansal, il a un vrai talent de conteur, son écriture est aussi très belle, on sent un homme intelligent et érudit, qui sait écrire. Mais (et oui....) ce livre là ne m'a pas beaucoup plu.

Je n'aime pas lire ce genre parce que je n'aime pas trop me faire peur, et là je n'ai pas eu peur, je n'y ai pas vraiment cru, parce qu'il ne va pas tellement en profondeur, le personnage est un peu fade, on ne sait pas trop ce qu'il ressent vraiment, ses émotions. Malgré sa curiosité de découvrir la Vérité il semble un peu simplet. En fait j'aurais voulu plus de pages, plus de ressenti, plus de descriptions. En fait je crois que pour moi il manquait du réalisme mais ce n'est peut être pas ce que l'auteur voulait...

Il nous a raconté son histoire, un petit bout de sa vie, et on retrouve des choses qu'il a vécu dans ce roman, on comprend mieux certain passage, c'est évidemment ce qui rend toujours passionnant la rencontre avec les auteurs !
"Le mot le dérangeait plus que cela. Mécroire, c'est refuser une croyance dans laquelle on est inscrit d'office mais, et c'est là que le bât blesse, l'homme ne peut se libérer d'une croyance qu'en s'appuyant sur une autre, comme on soigne une addiction avec des drogues, en l'adoptant plus avant, en l'inventant si besoin. Mais quoi et comment puisque dans le monde idéal d'Abi il n'y a rien qui permette de le faire, aucune opinion en compétition, pas un soupçon de postulat pour accrocher la queue d'une idée rebelle, imaginer une suite, construire une histoire opposable à la vulgate? [...] Sous l'empire de la Pensée unique, mécroire est donc impensable. Mais alors pourquoi le Système interdit-il de mécroire quand il sait la chose impossible et fait tout pour qu'elle le demeure ? ... Il eut soudain une intuition, le plan était si clair : le Système ne veut pas que les gens croient ! [...], car quand on croit à une idée on peut croire à une autre, son opposée par exemple [...]"
"Dans son ultime connaissance de l'artifice, le Système a tôt compris que c'était de l'hypocrisie qui faisait le parfait croyant, pas la foi qui par sa nature oppressante traîne le doute dans son sillage, voire la révolte et la folie. Il a aussi compris que la vraie religion ne peut rien être d'autre que la bigoterie bien réglée, érigée en monopole et maintenue par la terreur omniprésente. « Le détail étant l'essentiel dans la pratique », tout a été codifié, de la naissance à la mort, du lever au coucher du soleil, la vie du parfait croyant est une suite ininterrompue de gestes et de paroles à répéter, elle ne lui laisse aucune latitude pour rêver, hésiter, réfléchir, mécroire éventuellement, croire peut-être.  [...] croire n'est pas croire mais tromper; ne pas croire est croire à l'idée opposée et donc se tromper soi-même et se trouver à faire de son idée un dogme pour l'autre. Cela était vrai dans la Pensée unique... l'était-ce aussi dans le monde libre ?"
"C'est son regard qui attira celui d'At, c'était le regard d'un homme qui, comme lui, avait fait la perturbante découverte que la religion peut se bâtir sur le contraire de la vérité et devenir de ce fait la gardienne acharnée du mensonge originel."
Mais quel personnage !!! Super sympathique, gentil, attachant et passionnant, une belle rencontre !

dimanche 19 mars 2017

"Danser au bord de l'abîme" de Grégoire Delacourt


Emma a bientôt 40 ans, un mari, 3 enfants, une belle maison, une belle vie ; elle n'est pas malheureuse, plutôt heureuse même.
Mais voilà, un jour ses yeux tombent sur ses lèvres et plus tard leurs regards se croisent ; lui c'est Alexandre et il va bouleverser sa vie.

Qu'est ce que le désir ? L'envie ? L'envie du désir, le désir de l'envie ... Pourquoi tout briser, pourquoi tout quitter, sans savoir ?
Sans besoin particulier, sans rechercher quoi que ce soit, Emma va plonger dans l'inconnu, parce qu'elle a eu tout à coup ce désir au creux du ventre ? Parce qu'elle a eu envie ? Parce qu'elle est redevenue belle, pour elle, pas pour un autre, pour elle.

Grégoire Delacourt a le talent de savoir se mettre dans la peau d'une femme, de réussir à comprendre une femme, à en devenir une. Il explore très bien les questionnements, les interrogations, les besoins, les envies ...?!

Ce roman est surprenant, inattendu, il nous emmène très loin, au delà de ce que j'aurais imaginé.
Il nous emmène au désir (on l'aura compris), mais aussi à l'absence, la séparation, au manque, au deuil, à la maladie. Beaucoup d'émotions, c'est joli, c'est humain.
"Je transcris ici l'enchaînement des faits tel qu'il s'est déroulé. Je ne commenterai pas l'irrépressibilité de mon désir - elle est sans doute à chercher du côté du sacré. Je veux juste essayer de démontrer la mécanique du désastre. De comprendre pourquoi, plus tard, j'ai incisé à jamais le coeur de ceux que j'aimais." 
"Il y a des hommes qui vous trouvent jolie et d'autres qui vous rendent jolie."
" Léa avait haussé les épaules, poussé un petit soupir tragique, déjà, et lâché : mais si on l'aime, il n'y a aucune raison pour qu'il se sauve. Mon mari ne m'avait ni attachée ni enfermée, et pourtant, j'allais m'échapper." 

mercredi 15 mars 2017

❤️❤️❤️ "Arrête avec tes mensonges" de Philippe Besson



Alors, premier Besson que je lis.
Pourquoi celui-là ? Parce que vu et entendu Philippe Besson à propos de ce roman/récit et que déjà dans ces interviews il m'a touché et ému, il a piqué ma curiosité :
"C'est parce que la fin de l'amour existe dès le départ que l'amour est possible à ce degré là d'incandescence."
En une seule phrase il en dit déjà beaucoup sur le livre.
Il raconte son premier grand amour, il a 17 ans, il s'appelle Thomas....
C'est la campagne, les années 80, l'un est l'intello binoclard et l'autre le ténébreux, mystérieux.
L'un s'assume, l'autre pas... déjà à cet âge une grande maturité, une grande peur.
L'année du bac, la dernière année de lycée.

C'est un livre sur le manque, sur la défection, sur l'amour, les contraintes, la liberté, beaucoup de choses qui font réfléchir, qui touchent, qui émeuvent. Une époque moins tolérante qu'aujourd'hui mais qu'en est-il vraiment ?

C'est beau, c'est fort, on frissonne.

La rencontre amoureuse, la première, est magnifique, elle se terminera sur ses mots "parce que tu partiras et que nous resterons". Une lucidité déjà tellement incroyable chez Thomas, une prémonition (?), mais c'est cette lucidité, cette conscience du temporaire qui permettra cet amour, en tout cas pour Thomas.

Ce premier amour retraversera la vie de Philippe Besson, plus de 20 après, d'une façon incroyable et "merveilleuse". Et peut être triste aussi ; avec un sentiment de si seulement...

Pas de misérabilisme, des mots justes, des phrases courtes, du rythme.

Le talent d'écrivain et de conteur de Philippe Besson n'est plus à défendre mais cela n'empêche pas de redire que ce livre est bien écrit.
"J'ai dix-sept ans. Je ne sais pas que je n'aurai plus jamais dix-sept ans, je ne sais pas que la jeunesse, ça ne dure pas, que ça n'est qu'un instant, que ça disparaît et quand on s'en rend compte il est trop tard, c'est fini, elle s'est volatilisée, on l'a perdue, certains autour de moi le pressentent et le disent pourtant, les adultes le répètent, mais je ne les écoute pas, leurs paroles roulent sur moi, ne s'accrochent pas, de l'eau sur les plumes d'un canard, je suis un idiot, un idiot insouciant."
"Je découvre la morsure de l'attente. Parce qu'il y a ce refus de s'avouer vaincu, de croire que c'est sans lendemain, que ça ne se reproduira pas. Je me persuade qu'il accomplira un geste dans ma direction, que c'est impossible autrement, que la mémoire des corps emmêlés vaincra sa résistance. Je me dis que ce n'était pas seulement une histoire de corps, mais de nécessité. Qu'on ne lutté pas contre la nécessité. Ou, si on lutte, elle finit par avoir raison de nous."
J'ai aimé, j'ai été touchée, bouleversée, "touchée dans les tripes".

mardi 14 mars 2017

"Principe de suspension" de Vanessa Bamberger



Au départ il y a Thomas, père de famille mais surtout chef d'entreprise. Il dirige une usine qui fabrique des parties en plastique pour les inhalateurs, seulement il n'a qu'un seul client... et ce client décide de délocaliser....
Et il y a Olivia son épouse, artiste-peintre non reconnue, qui est mal, dans sa peau, dans sa vie...
Et les employés de l'usine, qui pour certains y travaillent depuis des dizaines d'années...

Mais un jour, c'est un comble, Thomas fait une crise d'asthme qui l'amène jusqu'à une insuffisance respiratoire et au coma.
Et Olivia chaque jour vient le veiller.

Les chapitres se succèdent avec comme titre les mots "principe" et "suspension" déclinés sous toutes leurs définitions possibles ; il y a les chapitres "avant", où l'on découvre ce qu'il s'est passé les quelques jours, les quelques heures avant la grande crise, et il y a les chapitres plus doux, plus calmes dans la grande chambre blanche de l'hôpital avec les bip des machines en fond sonore et Olivia, sa vie, ses questionnements.

Que va-t-il se passer pour cette usine ? Et comment en arrive-t-on là ?
Thomas va-t-il se réveiller ? Et Olivia ?

Premier roman très réussi, qui nous prend et nous emmène dans son tourbillon de la vie ; rien d'extraordinaire, une vie "banale", mais une vie de tout le monde, avec les silences, les non-dits, les peurs, et ce tourbillon de la vie ouvrière, des usines, qui avance et évolue presque sans que l'on ne puisse rien faire même avec un patron qui veut se battre mais qui perd tout. Chacun porte son fardeau, chacun doit vivre avec.

"Le couple est une suspension. Un médicament. Un équilibre hétérogène. La dispersion d'un solide insoluble dans un milieu liquide ou gazeux. Au début, les particules restent en suspension. La stabilité est garantie. Mais avec le temps, il faut agiter le médicament pour le préserver. Sinon les particules précipitent au fond du flacon, et se séparent."

lundi 13 mars 2017

"Voyage d'une parisienne à Lhassa" de Alexandra David-Neel




Encore un livre que je n'aurais jamais pris spontanément ! Vive le club de lecture qui nous pousse à nous tourner vers des choses nouvelles. (mais pas vraiment récente 😋)

Ce livre est le récit d'Alexandra David-Neel qui partit du Yunnan en Chine pour rejoindre Lhassa au Thibet, en traversant plusieurs cols, montagnes et plaines... et ceci en 1924.
Pour ce grand périple de plusieurs mois elle était accompagnée de Yongden  son fils adoptif mais aussi lama. À cette époque il était totalement interdit de se rendre au Thibet et encore plus pour une étrangère. Notre héroïne a dû user de différentes ruses pour parvenir à ses fins.
Elle s'est notamment déguisée en mendiante et s'est faite passer pour la pauvre mère du lama et épouse d'un "sorcier". Étant orientaliste elle avait une grande connaissance de ses régions lointaines et pouvait aussi très aisément parler plusieurs langages.

Son récit n'a pas pris "une ride", et lorsque l'on réalise qu'elle a effectué son voyage il y a bientôt 100 ans avec des moyens très réduits on ne peut qu'être admiratif de son exploit et de son courage. Car passer plusieurs mois dans le plus grand dénuement dans des contrées plus qu'hostiles presque seule, moi je dis chapeau !!!

Elle nous fait donc traverser avec elle les montagnes, les rivières et les forets mais elle nous emmène aussi à la rencontre des paysans, des religieux, de tout ce petit monde qu'elle croise sur sa route, bon ou mauvais...
Elle fini par arriver à Lhassa, au moment des fêtes du nouvel an, où elle passera deux mois toujours incognito,
On ne peut que se plonger littéralement dans ces pages et vivre avec elle au gré du froid, de la faim, et des paysages incroyables.

Et pour ne rien enlever au plaisir ce livre m'a été prêté dans une édition qui date de 1946, de quoi vraiment repartir en arrière.


mercredi 8 mars 2017

"Gauguin aux Marquises" de Laure Dominique Agniel



Ce livre est un document qui revient sur la vie de Gauguin et en particulier sur ses années passées en Polynésie française, d'abord à Papeete (Tahiti) puis aux Marquises où il finit sa vie.
Laure Dominique Agniel nous raconte son mariage, la naissance de ses enfants puis sa passion croissante pour la peinture qui lui fait quitter son travail de banquier pour s'y consacrer totalement.

Contre toute attente j'ai plutôt bien aimé ce récit.
Je n'aurai jamais spontanément choisi ce livre ; il fait parti des titres proposés par la bibliothèque orange à laquelle je me suis inscrite. J'avais longuement hésité et ce qui m'avait décidé était l'idée justement de faire des découvertes. Et voilà c'est chose faite !

Donc Gauguin, finalement je ne connaissais pas sa vie, si peu.
Sa biographie est assez rapide mais très bien faite et l'auteur s'attarde plus sur la fin de sa vie qu'il a passé aux Marquises. Il a énormément peint pendant cette période, mais aussi écrit, sur sa vie, sur ce peuple maori colonisé. Il va d'ailleurs passer la fin de sa courte existence à se battre contre l'administration, la gendarmerie et les religieux qui "exterminent" un peuple en voulant absolument les "civiliser", en tuant leurs traditions, leur culture, leurs origines, en les rendant incapable de survivre sur leurs iles, en leur apportant toutes les maladies du continent.
"L'opium les a émaciés, les terribles jus fermentés les ont corrodés d'ivresses neuves. La phtisie creuse leurs poitrines, la syphilis les tare d'infécondité. Mais qu'est-ce que tout cela sinon les modes divers de cet autre fléau : le contact des "civilisés". Dans vingt ans, ils auront cessé d'être "sauvages". Ils auront en même temps à jamais cessé d'être."

Il mourra détesté, haï, controversé par rapport à ses moeurs. La collusion du gendarme et de l'évêque lui ont beaucoup porté préjudice. On lui reprochera d'avoir abandonné sa femme et ses enfants (5) au Danemark et d'avoir "semé" d'autres enfants sur les îles...
Et pourtant ces oeuvres deviendront déjà célèbre seulement 3 ans après sa mort.

Une autre découverte intéressante pour moi, est qu'un jeune médecin de la marine, poète à ses heures, lui aussi tombé amoureux de ses iles du bout du monde, voudra rencontrer Gauguin pour échanger sur cette passion commune. Il arrivera malheureusement 2 mois trop tard, mais écrira sur Paul Gauguin, son oeuvre et sa passion, il le défendra contre les attaques non justifiés. Ce jeune homme est Victor Segalen qui a donné son nom au lycée français de HK, nom que je n'avais auparavent jamais entendu. Il a écrit au moins deux ouvrages consacrés à Gauguin et qui sont probablement passionnant, si un jour j'ai le temps.

Bref, en quelques 200 pages il y a beaucoup d'informations, très bien organisées, expliquées, racontées. Belle découverte et pour peu que vous soyez un tant soit peu intéressé par Gauguin et/ou les îles Marquises, je vous recommande cette lecture facile et rapide.

"Marie, l'arrière-petite-fille danoise de Gauguin, a été invitée à Tahiti pour le voyage inaugural du paquebot de croisière Paul-Gauguin en 1998. À bord du bateau qui porte le nom de son illustre aïeul, elle est tombée amoureuse d'un Polynésien qui travaillait à la télévision locale. Ils se sont mariés et sont partis vivre à Copenhague. Son arrière-petite-fille danoise mariée à un Polynésien : ses deux univers réconciliés et réunis, voilà qui eût enchanté Paul Gauguin !"

Comme quoi parfois le destin se permet de "rattraper " les choses !!!

Lu via la "bibliothèque orange".

vendredi 3 mars 2017

"Voici venir les rêveurs" de Imbolo Mbue



Jende vit à New-York depuis déjà plusieurs mois lorsqu'il fait venir sa femme et son fils du Cameroun. Il a travaillé dur dans des restaurants, puis comme chauffeur de taxi tout en étant très mal payé. Il décroche enfin le boulot de rêve : chauffeur particulier d'un riche banquier qui travaille chez Lehman Brothers. Lui et sa famille vont se lier aux Edwards.
L'épouse de Jende, Neni, est étudiante et veut devenir pharmacienne. Tout deux veulent vivre le "rêve américain" et offrir à leur fils une vie meilleure, pleine d'opportunités. Il faut donc absolument décrocher le sésame, la "green card"...
Mais nous sommes en 2007 et la crise vient d'éclater....

Ce premier roman de la camerounaise Imbolo Mbue nous parle du choc des cultures, de ces africains qui rêvent de la vie merveilleuse qu'ils peuvent avoir aux USA et des déceptions qu'ils vivent une fois installés. C'est vouloir à tout prix manger l'herbe qui parait plus verte chez le voisin. Mais à quel prix ? Est ce que finalement c'est mieux plus loin, ailleurs ?

J'avais particulièrement envie de lire ce roman car très bien vendu par l'éditeur qui m'avait accroché avec la phrase suivante dans sa présentation :
"S'inscrivant dans la lignée d'Americanah de Chimamanda Ngozi Adichie ou du Ravissement des innocents de Taiye Selasi..."
ayant eu de gros coups de coeur pour ces deux romans cités j'y suis donc allée sereinement en fermant les yeux.
Évidemment j'ai été déçu, le livre n'est pas mauvais et loin de là, il est même très bien. Très bien écrit et raconté mais absolument pas à la hauteur des 2 ci-dessus que je vous recommande plus que vivement.
Donc un bon roman, avec quelques longueurs (notamment au milieu on ne sait plus trop si c'est l'histoire de la famille de Jende ou de son patron...), un moment de lecture très agréable.
Allez-y !!!