"Car la lecture est un singulier dialogue qui ne rêve que de pluriel, celui du désir incandescent d'échanger, de partager et de confronter ses impressions de lecture, de les dire aux autres et au monde, un désir puissant de faire circuler les oeuvres et de donner aux mots aimés l'écho le plus long et le plus lointain possible" Manuel Hirbec pour "Page"
samedi 22 décembre 2018
"On ne voyait que le bonheur" de Grégoire Delacourt
Antoine est expert en assurance, il évalue le prix des choses, des vies...
Il est marié avec Nathalie, ensemble ils ont deux enfants, Joséphine et Léon.
Alors c'est parti on y va : petit il a perdu une soeur, sa mère est partie et l'a complètement abandonnée, sa femme le trompe, son père est malade, et bien sur il est viré, ouah tout ça pour un seul homme, alors oui bien sur il pète un plomb, et fait une énorme bêtise.
Puis on le retrouve au Mexique où il essaie de se racheter une deuxième vie.
Enfin sa fille Joséphine donne son sentiment sur tout ça (j'essaie quand meme de ne pas trop en dévoiler pour ceux qui voudraient encore le lire).
Donc vous l'aurez compris je n'ai pas aimé ce livre.
Du pathos, en veux-tu ? en voilà !!
Je n'ai pas cru une demi-seconde au personnage d'Antoine qui pour moi est faux du début à la fin, il n'y a rien de crédible dans cette histoire.
Alors c'est sur il sait écrire, et c'est tant mieux ça permet d'avancer vite vite ; j'ai failli abandonner plusieurs fois mais je me disais que peut-être au bout... et alors ce n'est pas faux, dans la dernière partie il y a de jolies choses (ouf) sur le pardon.
Mais bon ensemble pour moi plus que médiocre, sur le même thème (encore une fois que je tais pour ...) lisez plutôt "Bord de mer" de Véronique Olmi qui pour le coup est poignant et magnifique.
JC Lattès, 360 pages.
"Leurs enfants après eux" de Nicolas Mathieu
PRIX GONCOURT 2018
Il y a aussi le cousin (d'Anthony), avec sa mère dépressive ; les parents d'Anthony - un père violent et alcoolique, une mère qui s'est trop longtemps tue.
Il y a Hacine, ses potes et son père.
Et tous les autres
Et puis il y a aussi la drogue, l'alcool, les fêtes, la violence, les flirts, l'amour, le chômage, l'ennui...
C'est l'Est, la région des hauts-fourneaux qui ne brûlent plus, des usines qui sont fermées....
De ce premier été en 1992 jusqu'à l'été de la première victoire de la France en coupe du monde, Nicolas Mathieu nous emmène à la suite d'Anthony et de ses comparses, on suit l'évolution de nos héros au fil du temps, de leurs expériences, de leurs rencontres. De la tendre adolescence au jeune adulte, les années charnières, les années de construction.
Des personnages qui nous ressemblent, des personnages que l'on a croisé, que l'on a fréquenté... d'autant plus que je suis de cette génération, de cette époque, alors forcément on s'y retrouve un peu, beaucoup.
Une magnifique chronique sociale d'une époque révolue, d'une époque où l'on parlait encore de "catégories socio-professionnelles", d'une époque sans tablettes, sans téléphone, sans internet, d'une époque où l'on se rencontrait au bal, dehors...
J'ai beaucoup aimé ce roman dans lequel je me suis plongée sans retenu, dans lequel je suis restée bien longtemps après avoir refermé la dernière page.
L'écriture, sans être très littéraire, est belle et agréable, l'histoire est simple, mais prenante, il n'y a pas de doute. Un très très bon moment de lecture.
Actes Sud, 426 pages.
jeudi 20 décembre 2018
"La beauté des jours" de Claudie Gallay
Jeanne a tout pour être heureuse, un travail à la poste qui lui plait, un mari aimant et travailleur, deux filles étudiantes et épanouies, une maison, un jardin, une très bonne amie.... Elle aime son train-train quotidien, sa routine, cela la rassure et la rend heureuse, à priori.
Elle aime aussi passionnément l'artiste-performeuse Marina Abramović à qui elle écrit des lettres qu'elle n'envoie jamais.
Et pour mettre un peu de piment dans sa vie elle suit des inconnus dans la rue pendant sa pause déjeuner, jusqu'au jour où elle se retrouve à suivre un ancien amoureux du temps de son adolescence.
Une jolie histoire, facile et agréable à lire mais qui personnellement ne m'a pas apporté grand chose hormis un bon moment de lecture et tout de même la découverte de Marina Abramović !
Malheureusement après quelques jours il ne m'en reste pas grand chose.
Un peu comme la vie de Jeanne, c'est calme, à la limite de l'ennuie, charmant et puis ... ça passe.
Il manque un petit quelque chose pour en faire un roman inoubliable et pétillant.
Actes Sud, 404 pages.
mardi 18 décembre 2018
"La marcheuse" de Samar Yazbek
Dans ce roman Samar Yazbek nous raconte l'histoire d'une jeune syrienne née avec une étrange maladie, son cerveau ne contrôle pas ses jambes qui ne savent pas s'arrêter et si on ne l'attache pas elle marche, marche, marche.
Ainsi elle vit attachée tout le jour à son lit, ou au bras de sa mère, parfois de son frère.
Elle est considérée comme folle par la plupart des gens qui l'entourent car en plus de ne pas être capable de s'arrêter elle ne parle pas, jamais, elle chante simplement des cantilènes.
La guerre civile va bouleverser la vie de Rima, qui va se retrouver dépendante de son frère puis d'un de ses amis. Pour la protéger elle est enchainée dans différents endroits en sous-sol, des semblants d'hôpitaux où elle survit avec d'autres malheureux puis seule, totalement seule sous les bombardements de l'aviation civile.
Rima écrit un journal, une longue lettre par le biais de dessins, elle raconte ce qu'elle vit, ce qu'elle pense, elle parle des histoires qu'elle a lu et aimé, le Petit Prince mais aussi Alice au pays des merveilles.
C'est un livre difficile à lire, et pour lequel j'ai beaucoup de mal à avoir une opinion claire.
En effet l'auteur prend le parti de nous raconter l'horreur de la guerre en Syrie sur un ton un peu naïf, enfantin, ce qui accentue les abominations dont elle est témoin tout en rendant la lecture parfois ennuyeuse et du coup aussi peu crédible.
Ce qui est un peu dommage car je sais que cette auteur a vu et vécu le pire en Syrie, je suis sûre qu'elle n'exagère rien et que tout est vrai, cependant le côté puéril de Rima m'a gâché un peu trop mon plaisir de lecture.
Malgré tout un témoignage crucial et vrai surtout lorsque l'on a lu son récit de ses différents voyages en Syrie ("Les portes du néant") ou le témoignage de Delphine Minoui ("Les passeurs de livres de Daraya").
Stock, 291 pages.
lundi 17 décembre 2018
❤️ "Les huit montagnes" de Paolo Cognetti
Lorsque Pietro est encore enfant ses parents décident de louer une maison à Grana, un village perdu dans la montagne, pour passer l'été.
Chacun y trouve son compte, la mère aime la montagne des prairies et des forêts, tandis que le père aime partir à l'assaut de la montagne au cours de longues randonnées, et Pietro se fait un petit copain, Bruno.
Bruno est un enfant du village qui passe plus de temps dans les pâturages qu'à l'école, et chaque été il emmène Pietro à la découverte de la montagne.
Les années passent, Pietro grandit, quitte le nid familial et ne revient plus trop à Grana. Jusqu'à ce que le coeur de son père lâche subitement et que Pietro se retrouve propriétaire d'une ruine en pierres en haut de la montagne. Il va alors retourner dans ce village, retrouver son ancien ami Bruno.
C'est une très belle histoire d'amitié mais surtout de montagne, la montagne qui est presque le personnage principal de ce roman. On traverse les forêts de pins, les prairies où paissent les vaches, les chèvres, et plus haut la rocaille, les névés, les glaciers.
On respire l'air pur, on sent le poids de la neige, son bruit délicat, on vit le printemps avec le lac qui dégel, les fleurs qui explosent, la vie qui renait.
J'ai énormément aimé ce livre, très simple et très beau. Il m'a fait voyager dans la nature, loin de la ville. L'histoire entre Bruno et Pietro et sa famille est aussi très belle, touchante.
Un livre parfait pour les amoureux de la nature et de la montagne en particulier, un livre qui fait rêver doucement.
Le Livre de Poche, 284 pages.
jeudi 13 décembre 2018
"Mille petits riens" de Jodi Picoult
Ruth est africaine-américaine, elle est sage-femme dans l'hôpital de sa ville depuis plus de 20 ans.
Elle a un garçon, brillant lycéen, qu'elle élève seule, son mari est décédé en mission en Afghanistan il y a déjà plusieurs années.
Ruth vient d'un milieu pauvre, sa mère est femme de ménage dans une riche famille (blanche) new-yorkaise, mais Ruth a voulu faire des études et à force de conviction et de persévérance elle a réussi à se hisser dans la classe moyenne, où elle n'est entourée que de blancs....
Un jour Ruth prend son service, un bébé est né peu de temps auparavant, elle va donc à sa rencontre pour s'en occuper. Le contact avec les parents lui semble étrange mais elle fait son travail sans se formaliser et plus tard sa chef vient l'informer qu'elle ne peut plus s'occuper de ce bébé car les parents ne souhaitent pas que des personnes africaines-américaines s'approchent de leur famille...
Trois jours après sa naissance le petit Davis décède et bientôt Ruth est mise à pied, puis en garde à vue et accusée de meurtre ....
Davis était un petit garçon né dans une famille de suprématistes blancs qui ont décidé d'attaquer Ruth pour le meurtre de leur enfant.
L'histoire nous est racontée à travers les voix de trois personnages ; Ruth, évidemment, qui est notre personnage principal, Turk qui est le père suprématiste et Kennedy qui sera l'avocate de Ruth.
On pourrait penser encore une histoire de racisme.... mais non, enfin si bien sûr, mais l'histoire est plutôt bien montée. L'auteur soulève des questions intéressantes, en particulier du côté des blancs qui se disent et se pensent non-racistes, elle met le doigt sur des phrases, des (fausses?) idées, qui peuvent sembler non-racistes mais sont finalement mal-perçues. Tout est une question de vécu, de quotidien, d'empathie.
L'auteur met en place le contexte, l'histoire qui va amener à l'arrestation de Ruth puis son procès.
Il y a encore du chemin a faire en terme de tolérance, d'acceptation de l'autre et de la différence, et pas seulement en ce qui concerne la couleur.
Un très bon roman, long, mais que l'on dévore.
Actes Sud, 581 pages.
lundi 10 décembre 2018
"Habemus piratam" de Pierre Raufast
Dans un village de campagne un curé se passionne pour les confessions d'un hacker informatique professionnel.
Ce curé ne supporte plus les petites mesquineries des "petites vieilles" du village qui pour se tenir occupées se font vacheries sur vacheries.
Alors lorsque cet homme mystérieux vient lui confesser ses péchés au travers de ses histoires incroyables de hacker il est tout ouï et chaque jour il attend impatiemment la nouvelle confession.
Dans la même veine que ses trois premiers romans (La fractale des raviolis, La variante chilienne, la baleine thébaïde) Pierre Raufast nous emmène dans des histoires qui tout en étant indépendantes les unes des autres construisent l'intrigue principale.
Il a beaucoup d'imagination et surtout beaucoup d'humour. On apprend des choses sur le milieu informatique, le net, le darknet, et même si parfois le sujet n'est pas toujours évident pour les non-initiés les explications, elles, sont toujours très claires.
Un moment de détente, de lecture sympa et facile.
Je reste une inconditionnelle de l'auteur qui à chaque fois me surprend avec son style si particulier et ses histoires un peu rocambolesques.
Alma Editeur, 220 pages.