Je me suis beaucoup interrogée sur les articles que je souhaite écrire, les livres dont je veux parler.

Dois-je faire un article pour chaque livre ? Ou uniquement ceux qui m'ont vraiment plu ?

La réponse je l'ai trouvé en pensant à mon club de lecture ; nous y sommes pour parler de tous les livres que nous lisons, pour échanger, discuter, alors comme l'idée est de faire un peu pareil ici, j'ai décidé de tout mettre. Il y aura donc des articles courts, des plus longs, des passionnés et des plus ternes. Certains vous donneront peut-être envie de lire le livre concerné, d'autres vous donneront peut-être envie de me convaincre...

Alors soyez indulgents, et surtout n'hésitez plus à faire un commentaire !

Au plaisir de (vous) lire.

mercredi 18 janvier 2017

❤️❤️ "Les portes du néant" de Samar Yazbek

"Pour les martyrs de la révolution syrienne. 
 J'écris d'une main tremblante.
 J'écris à l'aveugle.
 ...
 J'écris pour vous qui avez été trahis." 

Samar Yazbek est syrienne, alaouite, journaliste et écrivain reconnue. Après avoir pacifiquement manifesté contre le régime Assad et publié des articles la plaçant clairement dans l'opposition, elle a du fuir son pays et s'exiler en France avec sa fille quelques mois après le début de la révolution en 2011 - dont elle est une des plus célèbre porte-parole.
Ce livre est un documentaire qu'elle a écrit après être retourné plusieurs fois en Syrie entre 2012 et 2013, d'abord pour tenter de préparer "l'après-Assad", puis pour témoigner, donner une parole, une vie, un écho à toute cette souffrance.

Témoignage-essai publié en mars dernier, il est déjà ancien... l'Histoire a déjà avancé, changé...
Mais au moment des polémiques sur la médiatisation de la guerre à Alep - de sa destruction - il est bon de se replonger dans une certaine réalité.
Bien qu'il [me] soit impossible de juger de l'objectivité de l'auteur, il semble que sa connaissance du sujet soit suffisamment fine et approfondie pour se laisser entrainer à "écouter" ce qu'elle a à raconter, à nous dire. D'ailleurs une des femmes avec qui elle a passé beaucoup de temps lors de ces "retours" au pays lui a dit : "Ne meurs pas ici. Pars tant que tu le peux et demeure ce fil qui nous relie au monde."

Après quelques mois d'exil en France, à Paris, Samar Yazbek décide donc de retourner clandestinement en Syrie, son objectif est de préparer le futur, d'aider les femmes à s'organiser en montant de micro-projets, en s'assumant (beaucoup sont veuves et seules avec de nombreux enfants), de continuer l'éducation des enfants et d'alphabétiser les femmes des campagnes. Ces 3 voyages qu'elle fera, en s'infiltrant par une brèche de la frontière turque, seront pour elle 3 portes qui la rapprocheront à chaque fois un peu plus du néant. A chaque fois elle sera reçue et hébergée par une famille de Saraqeb dans la province rurale du nord-ouest de la Syrie - la région d'Idib.
Elle va observer l'évolution de son pays, comment "une révolte populaire pacifique contre un dictateur s'est muée en une mutinerie armée contre les militaires et l'État, avant que les islamistes ne s'emparent de la scène et ne transforment les syriens en pantins dans une guerre par procuration".

Avec les multiples témoignages qu'elle nous rapporte, on comprend un peu mieux comment l'Histoire s'est faite et tout s'est enchainé...
Après les différents "printemps arabes", le peuple syrien s'est pacifiquement révolté contre le gouvernement de Bachar Al-Assad qu'il voulait renverser; les buts revendiqués de cette révolution étant la justice, la liberté et la dignité. Cependant cette révolution s'est vite transformée en guerre civile puis religieuse avec l'arrivée des djihadistes.

Lecture forte, troublante, émouvante, avec Samar Yazbek on comprend que c'est tout le pays qui est bombardé, attaqué, violé, pillé, humilié, bafoué. Coincé entre l'armée d'Assad, l'armée de la Syrie Libre, les djihadistes, les mercenaires... le peuple est à terre, incapable de relever l'échine.

"Je regardais Shaher, né dans ce pays, qui le défendait avec une arme et son engagement. En face, des mercenaires étrangers coupaient des têtes au nom de la religion, réécrivaient la loi, se comportaient en colonisateur."
"Tout ce chaos alors que les rebelles se tuaient à la tache en défendant une révolution qui leur échappait et devaient lutter sur deux fronts, contre le régime d'Assad et contre les groupes djihadistes qui pourrissaient la vie."
"Tout ce que je voyais était à la limite du supportable. Je n'étais pas assez forte pour ces tueries incessantes, pour ce mal qui se répétait à chaque seconde, enflait, se multipliait et finissait par avaler tout le pays."
"...les brigades djihadistes s'imposaient par la force des armes et de l'argent."
"...les raisons qui avaient donné l'avantage aux djihadistes takfiris. Je devinais sa réponse : les sources de financement et les hommes qui affluaient tous les jours des quatre coins du monde pour combattre sous le prétexte de défendre l'islam.

Stock, 306 pages.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire