lundi 28 janvier 2019

"Pleurer des rivières" de Alain Jaspard


Il y a Franck et Mériem, des Gitans d'Argenteuil. Franck est ferrailleur, pour nourrir sa grande famille - en effet Mériem n'a que 28 ans mais attend déjà son huitième enfant.

Il y a Julien et Séverine, des bourgeois de Paris. Julien est avocat et va régulièrement au tribunal des comparutions immédiates pour être avocat commis d'office, pendant ce temps Séverine dessine et écrit des livres pour les enfants sur les petits animaux et insectes que tout le monde déteste. Ils ont tout pour être heureux.... ou presque.

Et puis un jour Franck, en voulant rendre service à son vieux et fidèle ami Sammy, va faire une bêtise et atterrir au tribunal, c'est là qu'il rencontrera Julien qui sera son avocat....
Cette rencontre va pousser les deux familles à vivre une aventure ensemble ; une aventure lourde de conséquences.

Un premier roman assez prometteur, même si tout n'est pas parfait. On s'attache aux personnages plutôt bien plantés et l'histoire est prenante, je l'ai lu d'une traite même si j'ai eu un tout petit peu de mal au départ avec le langage. Langage un peu châtié des aires de campement où se retrouvent les Gitans, les Yéniches et autres Tsiganes, mais finalement on s'y fait et on se plonge dans ces deux mondes qui se télescopent.

Une histoire pleine d'amour et d'amitié.

Éditions Heloïse d'Ormesson, 190 pages.

samedi 26 janvier 2019

"Zao" de Richard Texier


Dans un court récit Richard Texier rend un hommage vibrant à son ami peintre franco-chinois, Zao Wou-ki.
C'est un texte très touchant sur l'histoire d'une amitié, amitié partagée autour d'une passion commune, la peinture.
J'ai aimé le ton du livre, cette chaleur dans l'amitié, ce grand respect d'un artiste pour un autre, j'ai aimé entendre le rire de Wou-ki dans les mots de Richard.
C'est un livre d'une grande tendresse et d'une douceur infinie.

Je ne suis pas très érudite en terme d'art mais cela m'a permis d'aller rechercher un peu plus d'informations sur Zao mais aussi sur Richard Texier, sur leurs oeuvres respectives.

Dans ce livre Richard parle aussi d'images qu'il a faites de Zao et notamment d'images vidéo, il m'a donné envie d'entendre le rire et la voix de l'artiste, de le sentir vivre et vibrer.

Alors curieuse je suis allée sur internet et j'ai trouvé le petit film dont il est question dans le livre et que Richard Texier a filmé avec son téléphone, vous trouverez le lien ICI .
"J'ai commencé ce jour-là une collection d'oeuvres de Zao Wou-ki. Elle me console aujourd'hui du manque de sa présence amicale et me remet en mémoire nos échanges d'artistes. Je revois sa main qui dansait  dans l'espace pour terminer les phrases quand les mots lui manquaient. Il tentait d'exprimer l'indicible en mimant dans l'air le geste du peintre qui parvient à capter le vol de l'esprit."
"L'affection s'accommode bien du silence. Il ne gêne que les étrangers. La présence bienveillante d'un ami suffit largement au bonheur partagé, toute parole est alors superflue."
"Il y avait de l'enfance dans cet homme-là." 
Gallimard, 153 pages.



vendredi 25 janvier 2019

"Les mots entre mes mains" de Guinevere Glasfurd



1634, Helena Jans van der Strom entre au service de Mr Sergeant, un libraire anglais installé à Amsterdam. Helena n'est pas une servante comme les autres car elle est capable de lire et d'écrire bien qu'à cette époque les petites filles n'étaient pas instruites.

Elle est plutôt satisfaite de sa vie chez le libraire ; peu à peu elle devient ami avec la servante de la maison d'à côté, elle trouve des solutions pour écrire et réussit même à former son amie à la lecture et à l'écriture.

Mais un jour un invité très spécial vient s'installer chez Mr Sergeant, il s'agit de René Descartes, philosophe, mathématicien, physicien, biologiste .... Cet homme étrange va se rapprocher peu à peu d'Helena qui va se sentir "considéré", il est comme un féministe avant l'heure et encourage le fait que les femmes puissent s'instruire. Peu à peu le lien entre eux va se renforcer, se transformer... Descartes est en pleine écriture de son fameux "Discours de la méthode", il est occupé à observer, disséquer, écrire ; Helena est présente, participe, aide.

Ensemble ils auront une fille dont Descartes sera très proche mais pourtant il n'épousera jamais Helena, elle est servante et beaucoup plus jeune que lui, c'est le 17ème siècle, encore très religieux. Alors il les garde près d'elle et les cache, avec l'aide de son valet, Limousin, qui lui n'est pas très fan de l'idée... peut être un peu jaloux...

C'est un premier roman très réussi qui se base sur l'Histoire, celle de Descartes en particulier, de la Hollande et des découvertes scientifiques, mais c'est aussi une magnifique histoire d'amour romancée, l'histoire d'une femme qui sait ce qu'elle veut et qui se bat, une femme forte et sensible.

Je me suis beaucoup attachée à Helena, son environnement, son caractère, sa force et j'ai découvert René Descartes dont finalement je ne savais pas grand chose.

Merci à Sophie qui m'a fait découvrir ce roman, vous pouvez lire sa très belle critique ICI.

Préludes, 435 pages, traduit par Claire Desserrey.

lundi 21 janvier 2019

"Noces de neige" de Gaëlle Josse



Deux femmes, deux époques, deux trains, deux histoires, deux destins... peuvent-ils être liés ?

Mars 1881, Anna et sa famille - de la grande aristocratie russe - quittent Nice pour retourner chez eux à Saint Pétersbourg reprendre leur quartier d'été après avoir passé l'hiver au bord de la mer sous un ciel bleu azur. Anna est encore une jeune fille, elle est très heureuse de rentrer chez elle car elle va - enfin - retrouver le beau Dimitri qu'elle s'est promis d'épouser. Elle doit partager la même chambre que Mathilde, la gouvernante française de son jeune frère, qu'elle ne supporte pas.
Le voyage en train doit durer 5 jours, il faudra de la patience.

Mars 2012, Irina monte dans le train à Moscou pour Nice où elle doit rejoindre le jeune, beau et talentueux Enzo avec qui elle correspond depuis plusieurs mois uniquement par email et qu'elle a rencontré via un site internet. Elle quitte tout, elle lâche tout et se lance dans ce voyage de deux jours qui l'amènera vers sa nouvelle vie.

Mais dans chacun de ces trains le voyage ne se déroulera pas exactement comme attendu et la vie des deux jeunes femmes en sera à jamais bouleversée.

Deux destinées de femmes dans deux huis clos intenses ; on entend le bruit du train sur la voie ferrée, qui signe le temps qui passe et la lente évolution des existences de ces deux femmes qui les emmènent inéluctablement sur une voie qu'elle n'avait jamais envisagé.

C'est le troisième roman de Gaëlle Josse que je lis, ce n'est pas mon préféré mais en revanche c'est toujours un plaisir de lecture, une belle écriture, des histoires toujours très originales et très bien menées, pas de déception.
Gaëlle Josse a trouvé sa voie et j'espère qu'elle continuera à nous enchanter avec ces beaux récits.

Pour mémoire, deux romans que j'ai énormément aimé de la même auteur, "Les heures silencieuse" et "Une longue impatience".

Le Livre de Poche, 122 pages.

samedi 19 janvier 2019

"Le lecteur de cadavres" de Antonio Garrido



Le roman commence en 1206 en Chine Orientale.
Notre héros se prénomme Ci, il a une vingtaine d'années, il vit avec ses parents, son frère Lu et sa soeur Troisième. Elle est ainsi nommée car c'est la troisième soeur née malade, les deux premières étant décédées.
La famille Song est revenue vivre dans son village d'origine après la mort du grand-père alors qu'ils étaient installés dans la grande ville de Lin'an où le père travaillait pour un juge et où Ci pouvait étudier.
Le retour à la campagne est particulièrement difficile pour Ci qui adorait s'instruire et voulait lui aussi devenir juge. Son frère ainé est très dur avec lui et le bat souvent.

Mais tout change le jour où Ci retrouve le cadavre de Shang dans le champ de son frère où il travaille.  -Shang de qui il devait épouser la fille.
Les évènements s'enchainent rapidement et Ci se retrouve obligé de fuir son village avec sa soeur Troisième. Il part donc pour Lin'an où il espère pouvoir retourner faire ses études.

Et ainsi nous suivons les péripéties de Ci dans une ville dangereuse où il faut se méfier de tout et tout le monde. Il va pourtant réussir à retourner étudier, et même mettre un pied dans le palais de l'Empereur, mais je n'en dirai pas plus...

Ci est une personnalité qui a réellement existé et son oeuvre est arrivée jusqu'à nous avec son "traité légiste", il est le précurseur si ce n'est le père de la médecine légale.

Antonio Garrido s'est très bien documenté sur lui mais aussi sur la culture chinoise et les traditions de l'époque, ce qui fait que ce roman est à la fois historique, policier mais surtout passionnant !!

Le livre de poche, 719 pages.

lundi 14 janvier 2019

"Le prisonnier du ciel" de Carlos Ruiz Zafon



Après "L'ombre du vent" et "Le jeu de l'Ange", Zafon continue sa série sur le Cimetière des Livres oubliés. Nous retrouvons Daniel mais surtout Fermin qui sera le héros de cette histoire.
Fermin l'ami fidèle de Daniel, qui fut enfermé dans les geôles de la terrible prison de Montjuïc, se retrouve confronté à de vieux fantômes alors qu'il s'apprête à épouser la belle Bernarda.

Un homme étrange vient à la librairie Sempere et laisse un livre pour Fermin.
C'est pour lui un retour brutal à cette période terrible de la seconde guerre mondiale et des heures noires du franquisme où tout opposant au régime était emprisonné dans des conditions plus que déplorables. Il était dans la cellule numéro 13, non loin de David Martin un auteur avec qui il va se lier.

Il y est question d'amitié, d'amour, de littérature, mais aussi de pouvoir et de vengeance.
Le jeune Daniel se trouvera lié à cette histoire d'une manière tout à fait inattendue pour lui, ce qui chamboulera beaucoup de choses dans sa vie.

C'est un roman que j'ai beaucoup aimé car Zafon une fois de plus sait nous entrainer dans ces histoires à rebondissements, même si cette fois il y a moins de "fantastique", il reste toujours un peu de mystère.
Après un moment très sombre la lumière revient à nous, et la fin nous donne très envie de se jeter dans le 4ème et dernier tome "Le labyrinthe des esprits".

Roman écouté en audiolivre, lu par Frederic Meaux, 7h47

Pocket, 384 pages.

jeudi 10 janvier 2019

"Mourir n'est pas de mise" de David Hennebelle


1974, Jacques Brel décide de partir en voilier faire le tour du monde.
Il embarque avec lui sa fille France et sa maitresse Maddly Bamy.
Il fuit le gris du ciel belge, les salles de spectacles fermées et enfumées, et les paparazzi.

Mais la vie ne fait pas toujours ce que l'on veut, ce que l'on avait imaginé.
Brel finira par s'installer aux îles Marquises, et malgré la maladie qui le ronge il composera un ultime album avant de partir pour toujours.

Un très joli texte, court, sur les 4 dernières années de vie du fabuleux chanteur que fut Brel.
On ressent toute la passion de l'auteur pour le poète ; moi il m'a emmené avec lui.
Je n'ai pas "connu" Brel de son vivant et hormis ses chansons les plus célèbres je reconnais que je ne savais pas grand chose de sa vie.

Un premier roman réussi, écrit avec finesse et poésie.

Autrement, 148 pages.

mercredi 9 janvier 2019

"Les cigognes sont immortelles" de Alain Mabanckou


Nous sommes en 1977, au mois de mars, à Pointe-Noire - Congo ; la veille (le vendredi 18) le Président Marien Ngouabi a été assassiné à Brazzaville.
C'est le récit des 3 jours qui vont suivre, d'un pan de l'Histoire du pays, et de l'histoire de Michel, 11 ans.
Car cet assassinat aura des répercussions politiques importantes pour le Congo et pour la famille de l'adolescent.

Michel vit seul avec sa mère et de temps en temps son beau-père papa Roger (qui retourne auprès de sa première épouse de temps à autre...). C'est maman Pauline qui a acheté la parcelle sur laquelle ils vivent, grâce à son travail de fournisseur de bananes.

Ce samedi 19 mars, Michel écoute la radio avec papa Roger, sous le manguier de leur parcelle tandis que maman Pauline prépare le déjeuner et que le chien Mboua Mabé somnole.
Ils écoutent "la voix de la Révolution Congolaise" la radio locale, mais qui ne dit rien sur l'assassinat qui a eu lieu la veille, alors que "La voix de l'Amérique" ne parle que de ça.
Bientôt une annonce officielle sera faite, c'est le début de l'effervescence dans tout le pays. Qui a tué le Président ? Que faut-il dire ? Taire ?
Puis un oncle - frère de maman Pauline - arrive, tout droit de Brazzaville, les nouvelles sont mauvaises, il faut prendre parti et des décisions, pour le bien-être de la famille.
Les choix de maman Pauline ne seront pas forcément ceux que l'on attend, et chaque décision aura des conséquences.

Alain Mabanckou nous raconte cette histoire comme une fable, en utilisant  l'exagération mais on sent bien que derrière ce choix narratif il y a une vraie détresse, du désespoir.

Il en profite pour nous raconter son enfance dans ce pays communiste, ami avec l'URSS, les chants russes patriotiques appris à l'école, le regard sur la France et ses Présidents avec leur petite valise.

J'ai trouvé ce livre émouvant, parfois drôle et surtout très instructif.
Je n'avais pas forcément été emballé par Alain Mabanckou avec mes précédentes lectures, mais je crois qu'il a finalement réussi à me prendre dans ses filets.

Seuil, 293 pages.

mardi 8 janvier 2019

PETIT BILAN 2018

Avec plus d'une centaine de livres lus cette année -malheureusement pas tous chroniqués- voici un condensé de mes lectures les plus marquantes.

(lien de l'article en cliquant sur le nom du roman)


PREMIERS ROMANS qui m'ont particulièrement touchée :
  • Encore vivant, un magnifique témoignage sur la bipolarité.
  • Ces rêves qu'on piétine, un roman différent sur la fin de la seconde guerre mondiale et Magda Goebbels.
  • Ça raconte Sarah, une passion amoureuse fulgurante et dévorante, un livre rythmé et réussi.
  • La vraie vie, une petite fille qui se bat pour retrouver le sourire de son frère malgré une famille en "vrac". 
ROMANS COUPS DE COEUR 😊:
LES PETITS LIVRES qui font du bien :
  • Neige, une petite douceur pleine de poésie, à lire et relire.
  • Nagasaki, une ambiance japonaise parfaite et surprenante.
  • Les heures silencieuses, un tout petit roman lumineux qui nous transporte au 17ème siècle.
LES LIVRES COUPS DE POING :
Et tellement d'autres...

Je vous souhaite à tous une excellente nouvelle année de lecture,
 découverte,
 partage,
 plaisir !

lundi 7 janvier 2019

"Salina, les trois exils" de Laurent Gaudé


Un bébé hurlant venu de nul part est amené et laissé par un guerrier à cheval dans la tribu Djimba, on attend, on observe, et Mamambala ne tient plus et prend l'enfant en son sein, elle la nommera Salina, l'enfant du sel, du sel de ses larmes qui ont tant coulé.
Salina grandira dans le village des Djimba, elle aimera mais elle sera aussi contrainte, forcée.
Elle partira, avec la vengeance enfouie au plus profond de ses entrailles.

A la fin de sa vie Salina se met en route avec son fils, Malaka.
Elle meurt en chemin et Malaka décide de lui trouver un bel endroit pour sa sépulture.
Il marche des jours et des jours avant d'arriver dans une ville, au bord d'un fleuve où l'attend Darzagar qui les prend à bord de sa barque pour les emmener vers l'île cimetière.
Mais pour que Salina soit acceptée dans ce cimetière il faut que son fils raconte son histoire, et ce n'est qu'après avoir entendu son histoire que le cimetière acceptera ou non de lui ouvrir ses portes.

C'est ainsi qu'au cours de plusieurs nuits, Malaka, ce fils aimant, va raconter la vie de sa mère, ses trois exils.

Laurent Gaudé nous livre ici un magnifique conte africain. Il y a de l'amour, de la violence, de la tendresse, beaucoup de poésie.
Le désert est brulant, le soleil haut dans le ciel, les traditions sont dures, violentes, la haine de l'homme est tout aussi brutal que sa lâcheté.

J'ai énormément aimé ce livre, l'écriture m'a prise et plongée dans ce conte cruel. On s'attache à ce fils qui raconte sa mère, et on s'attache encore plus à Salina, cette beauté des sables qui a tant souffert.
Un livre court mais superbement écrit, on le dévore et on se délecte de chaque mot.

Actes Sud, 149 pages.