"Petit pays" est l'histoire de Gabriel, et avec lui celle du Burundi et du Rwanda.
Gabriel est né au Burundi d'un papa français et d'une maman réfugiée rwandaise, il vit à Bujumbura au Burundi et a 11 ans, lorsqu'en 1993, éclate la guerre au Rwanda avec le génocide des Tutsis.
Gaël Faye m'a totalement envouté par son écriture, son récit.
Il nous décrit une Afrique magnifique où l'on a envie de se précipiter pour siroter des fanta à l'ombre des magnolias ou des manguiers, tout en écoutant la musique des oiseaux et des insectes. Malheureusement petit à petit ces douces chansons sont remplacés par les bruits de kalachnikovs et des coups de machette.
Avec Gabriel on découvre un enfant qui ne veut pas quitter son monde pour entrer dans celui violent des adultes, un enfant qui voudrait fermer les yeux et ne pas voir, vivre l'horreur humaine. Un enfant qui voit s'effondrer sa famille, sa mère partie à la recherche d'éventuels survivants.
Et la guerre les rattrape, et il faut fuir le Burundi.
Le petit Gabriel devenu adulte revient en arrière au pays de son enfance, de l'innocence.
J'ai énormément aimé ce livre, son histoire, son style. L'auteur nous emporte dans son monde de poésie, de jolies mots et de belles phrases malgré un sujet difficile et douloureux.
Je recommande vivement !
"Tu causes, tu causes, mais je connais l'envers du décor, ici - quand tu vois la douceur des collines, je sais la misère de ceux qui les peuplent. Quand tu t'émerveilles de la beauté des lacs, je respire déjà le méthane qui dort sous les eaux. Tu as fui la quiétude de ta France pour trouver l'aventure en Afrique. Grand bien te fasse ! Moi je cherche la sécurité que je n'ai jamais eue, le confort d'élever mes enfants dans un pays où l'on ne craint pas de mourir parce qu'on est ..."
"A l'OCAF, les voisins étaient surtout des Rwandais qui avaient quitté leur pays pour échapper aux tueries, massacres, guerres, pogroms, épurations, destructions, incendies, mouches tsé-tsé, pillages, apartheids, viols, meurtres, règlements de comptes et que sais-je encore. Comme maman et sa famille, ils avaient fui ces problèmes et en avaient rencontré de nouveaux au Burundi - pauvreté, exclusion, quotas, xénophobie, rejets, boucs émissaires, dépression, mal du pays, nostalgie. Des problèmes de réfugiés."
"Et quand il riait, Alphonse, la joie repeignait les murs du petit salon de Mamie."
"Il était comme nous, comme moi, un simple enfant qui faisait comme il pouvait dans un monde qui ne lui donnait pas le choix."
"J'ai fini par accepter son état, par ne plus chercher en elle la mère que j'avais eu. Le génocide est une marée noire, ceux qui ne s'y sont pas noyés sont mazoutés à vie."
Grasset, 216 pages.