Je me suis beaucoup interrogée sur les articles que je souhaite écrire, les livres dont je veux parler.

Dois-je faire un article pour chaque livre ? Ou uniquement ceux qui m'ont vraiment plu ?

La réponse je l'ai trouvé en pensant à mon club de lecture ; nous y sommes pour parler de tous les livres que nous lisons, pour échanger, discuter, alors comme l'idée est de faire un peu pareil ici, j'ai décidé de tout mettre. Il y aura donc des articles courts, des plus longs, des passionnés et des plus ternes. Certains vous donneront peut-être envie de lire le livre concerné, d'autres vous donneront peut-être envie de me convaincre...

Alors soyez indulgents, et surtout n'hésitez plus à faire un commentaire !

Au plaisir de (vous) lire.

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samedi 27 juillet 2019

"Mon Père" de Grégoire Delacourt



Alors le pitch est vraiment très rapide à faire ; un père, Édouard, est à la recherche d'un autre Père, le prêtre qui a violé son fils Benjamin. Il s'enferme 3 jours dans une église avec le Père Préaumont dont il vient de saccager le sanctuaire.

Au milieu de sa discussion avec le prêtre, Édouard nous fait revivre les premières années de Benjamin en partageant les moments doux, les moments de rire, les moments de bonheur qu'ils ont eu avant.
Car il veut comprendre ce qu'il s'est passé, il veut comprendre pourquoi, pourquoi son fils, pourquoi un homme fait ça, à un jeune enfant.
Comprendre pourquoi lui le père n'a pas pu protéger son fils, pourquoi il n'a pas vu ce que son fils exprimait et ne disait pas.
Et donc il fait parler le Père, il lui fait tout raconter, attention âme sensible s'abstenir, j'ai honnêtement failli arrêter la lecture car je ne voyais pas l'intérêt de lire ça, et d'ailleurs je ne suis toujours pas certaine de la nécessité de ce passage, en tout cas pour moi. J'avais bien compris l'idée...

Il y a beaucoup de références aux textes de la Bible et notamment à la parabole d'Abraham qui emmène Isaac son fils pour le sacrifier, mais l'ange retient la main d'Abraham et Isaac qui n'a pas dit un mot ne dira rien, plus jamais on ne parle de ce qu'il a vécu, c'est le silence, le silence de la victime. Le parallèle fait dans le livre est vraiment très intéressant.

Je ne veux pas dévoiler ce qu'il se passe donc je ne peux pas trop en dire, mais cette lecture se fait assez rapidement car il y a du rythme, le rythme de la colère du père, des journées qui s'écoulent avant le dimanche et l'heure de la messe, le rythme de l'effondrement de Benjamin.

Grégoire Delacourt n'épargne rien à l'Église en général, au silence manipulateur et politique, il dénonce.
Je reconnais avoir été surprise de le trouver sur ce registre, c'est pour moi un de ses livres les plus aboutis.
Je ne me sens pas de "recommander" ce livre, je crois que chacun doit savoir à quoi s'attendre, ce n'est pas facile, mais il y a des choses très intéressantes à retirer.

Le questionnement de la protection de nos enfants, le questionnement de la confiance aveugle en l'autre à cause d'une étiquette, ici le prêtre, mais cela pourrait aussi bien être le professeur, le grand-père, le cousin, tous ces gens à qui nous faisons confiance.
Il y est aussi question de ce que nous parents devons dire à nos enfants pour les prévenir, les avertir, les protéger ; qu'ils sachent que dans ce monde tous les humains ne sont pas bons, et que eux ne sont pas obligés d'être victimes.

La fin est un peu étrange et à mon sens pas vraiment positive ni optimiste, la fange humaine existe et se reproduit, "ce monde ne sera guéri que lorsque les victimes seront nos Rois".

Il y a malgré tout une très belle séquence sur le pardon, la revanche, le retour à la vie.
Bref un livre qui se lit vite mais à ne pas mettre dans toutes les mains. Une lecture que je ne regrette pas car elle pousse à la réflexion sur un sujet malheureusement encore trop d'actualité et réel, mais je crois en la parole, énormément, je pense qu'il faut dire les choses pour qu'elles ne s'inscrivent pas trop profondément.
"Et parce que je n'ai pas protégé ceux que j'avais la charge de consoler et de chérir. Et l'Église a fermé les yeux. L'évêque de notre diocèse a fermé les yeux. Le Vatican a préféré se coudre les paupières et manipuler les magistrats. Alors je me suis plu à imaginer que leur cécité étai tune forme d'assentiment. Car si les pères ne condamnent pas, si les pères n'interdisent pas, si les pères ne punissent pas, alors les fils conjecturent qu'ils ont tous les droits." 
JCLattès, 220 pages.