Il va donc falloir se battre.
" «- C’est quoi votre stratégie ?»
Je l’ai regardée. Pour la première fois depuis mon arrivée à la clinique, quelqu’un employait un terme militaire. J’ai observé mes jambes ballantes, mes pieds nus, le sol carrelé. Je me suis dit que j’étais en guerre. Une vraie. Une bataille où il y aurait des morts. Et que l’ennemi n’était pas à ma porte mais déjà entré. J’étais envahie. Ce salaud bivouaquait dans mon sein."
Les séances de chimiothérapie commencent, elle est très seule car Matt ne veut pas l’accompagner. Mais à l'hôpital elle va faire la connaissance de Brigitte, elle aussi en chimiothérapie.
Cette dernière va lui présenter sa compagne Assia, puis Mélody une jeune femme aussi en traitement.
Ces trois femmes vont aider Jeanne à vivre, à vivre malgré la maladie, malgré le traitement.
"« C’est assez dégueulasse », avait-il murmuré. Jamais je n’avais reçu un mot d’une telle brutalité. J’ai répondu que je n’y étais pour rien, que c’était le traitement, que nous savions tous les deux que cela devait arriver. Je lui ai dit que c’était lui qui était dégueulasse. Qu’à ses côtés, je ne me sentais pas seulement malade, mais sale aussi. Et moche. Et vieille. Et presque morte. Il était parti en claquant la porte. Et ce n’est que le soir qu’il s’était excusé. Il regrettait. Vraiment. Il ne savait pas ce qui lui avait pris."
Matt est très absent dans ce livre mais j’ai trouvé que son absence était un personnage à elle toute seule, elle est aussi la représentation de ce que vivent parfois les malades avec leur entourage.
Petit à petit les secrets des unes et des autres vont se dévoiler, les fardeaux des unes et des autres vont se partager jusqu’à ce que ensemble elles prennent une décision très grave pour aider l’une d’entre elles, elles veulent organiser un braquage…
Je ne sais plus dire si je ne suis pas objective ou si simplement Sorj Chalandon est réellement un très bon écrivain, mais moi il m’emmène encore une fois avec lui dans ce roman, je marche à fond parce que j’aime l’histoire et j’aime l’écriture.
Je me suis réellement attachée aux personnages et même si l’idée du braquage peut paraître un peu loufoque j’ai complètement adhéré car je crois sincèrement que la maladie peut nous pousser à tout faire, elle change tous nos repères, nos échelles de valeur, les limites ne sont plus les mêmes car on sait que demain peut-être nous ne serons plus là pour en parler.
« Le miroir ne parlait pas de moi, ni de Brigitte, ni de Mélody, ni d’aucune fille de notre temps. Dans ces presque ténèbres, serrées les unes contre les autres, se tenaient toutes les victimes des hommes. Les réprouvées. Les prostituées d’hier. Les femmes adultères. Les bagnardes. Les sorcières promises au bûcher. Ma terreur venait de les réveiller. Nous étions tête contre tête, peau nue contre peau nue, les mains des unes agrippées à la taille des autres. »
« Un matin j'avais écrit : "Mon destin m'échappe, c'est la première leçon du cancer". En me couchant, le soir où les filles m'avaient dévoilé leur plan, j'avais rajouté dans la marge : "Se répartirai rageusement son destin est la deuxième leçon."»Grasset, 320 pages.
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